tag:blogger.com,1999:blog-30971799276662773482024-03-19T13:20:15.447+01:00le traqueur d'hircocerfNotes prises ou poussées au fil de plus académiques pistesl'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.comBlogger72125tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-2757783239122936322017-03-30T09:17:00.000+02:002017-03-30T09:17:27.596+02:00Pécuchet ? Non : Napoléon !<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b69549099/f1.highres" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" src="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b69549099/f1.highres" height="500" width="640" /></a></div>
<span style="color: #cccccc;"><i>Exit le jardinier mélancolique</i></span>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-30399092600942993532017-02-21T14:16:00.001+01:002017-02-21T14:17:17.446+01:00Des nouvelles de la putréfaction<br />
Voici qu’en traduisant, je tombe sur ce miracle :<br />
<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjV2dtBAQztTja4C4sBFIzeW41Axe76xwWstI8xQJCnOyY1X73A6oaRcGQTmvdeVH8wgagIMdy94wKdfXKbvQ2gp1YhfyZYm-O9dIuLLcUO0ghL_Y3YGsYGssDz1OS-IudDl3w5ZBK1wX-m/s1600/content.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="640" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEjV2dtBAQztTja4C4sBFIzeW41Axe76xwWstI8xQJCnOyY1X73A6oaRcGQTmvdeVH8wgagIMdy94wKdfXKbvQ2gp1YhfyZYm-O9dIuLLcUO0ghL_Y3YGsYGssDz1OS-IudDl3w5ZBK1wX-m/s640/content.jpg" width="371" /></a></div>
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhf9xr1-6qv9ee2q-yteZtTDY3Y9KBloXOhh_U_YQ72OhZQqf0KY4c-aViLnwuNWEs6iV9tNFZ9sSSeUjczRffJ7sAPRpAQk-hCEPVmwuLDQf597I6upFe6_oVuG9RU8YzU-2XE8CgoIEMR/s1600/content02.jpg" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEhf9xr1-6qv9ee2q-yteZtTDY3Y9KBloXOhh_U_YQ72OhZQqf0KY4c-aViLnwuNWEs6iV9tNFZ9sSSeUjczRffJ7sAPRpAQk-hCEPVmwuLDQf597I6upFe6_oVuG9RU8YzU-2XE8CgoIEMR/s400/content02.jpg" width="392" /></a></div>
<br />
Il est tiré de la <i>Vie de Marie Elisabeth de la Croix</i>, par Henry-Marie Boudon (1685, <a href="https://books.google.fr/books?id=sqlQAAAAcAAJ&hl=fr&pg=PA279#v=onepage&q=porcellets&f=false">p. 279-280</a>) et il rappelle aux âmes préoccupées une certaine perdrix pourrie.<br />
<br />
<span style="color: #999999;"><i>Exit la fille tombée tombant en puanteur</i></span>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-69966931251634407412016-11-18T13:23:00.001+01:002016-11-18T13:23:10.075+01:00En lisant du Chateaubriand, Baudelaire<br />
<blockquote class="tr_bq">
Quand tu vas balayant l'air de ta jupe large,<br />Tu fais l'effet d'un beau vaisseau qui prend le large,<br />Chargé de toile, et va roulant<br />Suivant un rythme doux, et paresseux, et lent.<br />(...)<br />Ta gorge qui s'avance et qui pousse la moire,<br />Ta gorge triomphante est une belle armoire<br />Dont les panneaux bombés et clairs<br />Comme les boucliers accrochent des éclairs</blockquote>
<blockquote class="tr_bq" style="text-align: right;">
<i>Le Beau Navire</i>, str. 2-5 </blockquote>
<br />
On a glosé, beaucoup, ces images bizarres. En voici une lointaine parente :<br />
<blockquote class="tr_bq">
<br />les plus basses voiles, déployées dans leur largeur, s'arrondissent comme de vastes cylindres; les plus hautes, comprimées dans leur milieu, ressemblent aux mamelles des sirènes</blockquote>
<blockquote class="tr_bq" style="text-align: right;">
<i>Mémoires d'outre-tombe, liv. VI, ch. 2</i>. </blockquote>
<br />
<i><span style="color: #999999;">Exit l'esthétique (d)étonnante</span></i>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-21750118571708274742014-10-30T12:06:00.004+01:002014-10-30T12:20:54.873+01:00Car BaudelaireCar Baudelaire, c’est Emma qui aurait inventé Flaubert.<br />
<div style="text-align: right;">
<br /></div>
<div style="text-align: right;">
<div style="text-align: left;">
<span class="Apple-style-span" style="color: #999999; font-size: xx-small;"><i>Exit la vieille pensée enfin vêtue de langue, lue et moulée <a href="http://books.google.de/books?id=TgxdAAAAMAAJ&q=%22c%27est+tartuffe+qui+aurait+invent%C3%A9%22&dq=%22c%27est+tartuffe+qui+aurait+invent%C3%A9%22&hl=de&sa=X&ei=ZhtSVIfCEsi3OIrRgPgI&redir_esc=y">dans une phrase de Pennac</a></i></span></div>
</div>
l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-3494741375715583342014-06-14T13:38:00.002+02:002014-06-14T13:38:18.243+02:00<br />
<br />
Je n'avais encore jamais lu <i>La Princesse de Clèves.</i> Il y a des livres comme cela, qu'on lit bien tardivement, et qu'on espère lire bien <i>parce que</i> tardivement.<br />
<br />
Je suis en train de le finir. Quelques pages encore. Deux cent pages pour faire se rencontrer vraiment Mme de Clèves et M. de Nemours. Pour les faire se rencontrer dans la parole humaine.<br />
<br />
Mme de Clèves vient de sortir, laissant M. de Nemour et l'autorisant, et même l'en priant, à rendre compte de leur conversation au Vidame de Chartres, ami de lui et oncle d'elle.<br />
<br />
Et là, cette phrase:<br />
<br />
<blockquote class="tr_bq">
Que ne lui dit-il point pour lui dire ?</blockquote>
<br />
J'ai mis du temps à comprendre, de ces minutes-secondes par où l'horloge intime sonne et scande le passage du temps. J'ai pensé qu'il y avait peut-être une faute de typographie. (Je n'ai pas vérifié). Et puis en contexte, on restituait les personne derrière le masque des pronoms. Lui = le vidame. Il = M. de Nemour. Lui = Mme de Clèves. Le sens est à peu près: Que ne lui dit-il point pour qu'il le lui rapporte? Mais à peu près seulement, car en réalité, c'est bien <i>pour </i>le lui dire à elle qu'il le lui dit à lui. Et j'ai eu ce sentiment confus mais si beau qui accompagne la naissance d'une idée, d'une idée-chrysalide d'où se dégage avec lenteur et des tissus du non-réfléchi la compréhension d'un phénomène.<br />
<br />
Le premier constat ou la première pensée-impression était que cette phrase, sa structure datait. En elle se chiffrait le siècle de sa profération. Puis cette autre: ce twist imprimé au mot "pour", qui semble, contrairement à l'usage moderne, changer de sujet, tout en maintenant l'ombre du premier – qui échange la parole du duc et la parole de son ami auprès de leur destinataire, qui avalise l'équivalence et l'interchangeabilité de celui qui porte <i>effectivement</i> la parole (du moment qu'est fixé le point de départ et le point d'arrivée d'icelle), cette torsion de la grammaire est la trace laissée dans la langue par une société qui s'y couche, comme en ces grandes herbes des mots l'ombre des locuteurs comme autant d'animaux humains.<br />
<br />
<blockquote class="tr_bq">
Que ne lui dit-il point pour lui dire ?</blockquote>
<br />
À mes oreilles, et à mes yeux, désormais cette phrase est le miroir de <i>La Princesse de Clèves</i>, ou plutôt le reflet de l'impression que ce livre laisse en moi, de ces impressions où coexistent admirablement et organiquement l'image d'une société et la littérature qu'elle produit, le sentiment d'un livre et celui du monde qu'il restitue.<br />
<br />
J'espère que ces quelques mots suffiront pour deviner, quand on ne l'a pas sentie ou qu'on l'a oubliée, cette impression si nette de retrouver dans un étrange tour de langue l'étrangeté d'une littérature et d'un monde disparu – et qui ne subsiste plus que par ses livres, par ses phrases, et par le vide qu'il laisse en nous quand on regarde autour de nous.<br />
<br />
Si je devais m'adresser quelqu'un, en cet endroit précis, fût-il moi dans cinq ans, ce serait: que comprends-tu encore de ces lignes par quoi, filet mal reprisé, j'ai tenté d'attraper un poisson d'impression nette, aussitôt replongé dans la mer des idées non tout à fait pensées, dans les hauts-fonds de la pensée où on laisse tout replonger, parce qu'on n'a pas la force de tirer nos filets, ou le savoir-faire d'en tisser de plus sûrs.<br />
<br />
<i><span class="Apple-style-span" style="color: #cccccc;">Exit l'impression de lecture d'un livre dans une phrase, exit Mme de Clèves, et celle de La Fayette.</span></i>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-20297601121644331082014-05-05T23:58:00.000+02:002014-05-06T00:00:07.775+02:00Baudelaire, paysan belge ?<br />
<br />
On voit dans <i>Un Plaisant</i> un homme ganté saluer un âne pour la lui souhaiter bonne. Il s'agit de "l'ânée," et <a href="http://books.google.de/books?id=dv0rjGkB6ecC&pg=PA257&dq=baudelaire+un+plaisant&hl=de&sa=X&ei=8gZoU-GPA6XH0QW5sICoBg&ved=0CDUQ6AEwAA#v=onepage&q=baudelaire%20un%20plaisant&f=false">l'on a souvent glosé</a> sur l'ironie de ce poème en prose. Il se pourrait que cette ironie se déploie sur une toile de fond sociale:<br />
<br />
<blockquote class="tr_bq">
Les animaux domestiques, associés aux travaux de l'homme, qui l'accompagnent dans ses courses, et vivent presque sous le même toit, sont considérées par les paysans comme faisant en quelque sorte partie de la famille. Plusieurs actes en rapports avec cette idée ont été relevés de nos jours. En Wallonie, le fermier, sitôt levé, va à l'étable, et souhaite la bonne année à chacune de ses bêtes*. Cet usage est vraisemblablement rare en France : je n'en ai relevé aucune trace écrite, et ceux auxquels je me suis adressé pour savoir si on le connaissait dans leur région m'ont répondu négativement.</blockquote>
<br />
Paul Sébillot, en écrivant ceci en 1906 dans son <i>Folklore de France </i>(<a href="https://archive.org/stream/lefolkloredefran03sbuoft#page/102/mode/2up">p. 103</a>) citait un ouvrage belge paru en 1896 (<i><a href="http://www.google.de/search?tbm=bks&hl=de&q=%22la+bonne+ann%C3%A9e+%C3%A0+chacune+de+ses+b%C3%AAtes%22">Wallonia</a></i>). Il ne saurait donc s'agir d'une "source" d'inspiration livresque à cette scène de rue décrite par le poème en 18. Il peut s'agir d'un fait social sur quoi juger la "plaisanterie".<br />
<br />
Que Baudelaire ait ou non connu cet usage, on ne le saura jamais. Mais le geste qu'il décrit, s'il est référentiel, a peut-être eu lieu non à Paris, mais à Bruxelles. Et l'humour satisfait de l'homme ganté, sa performance, qu'il veut voir applaudie, c'était de contrefaire le paysan wallon.<br />
<br />
<br />
Déplacé à Paris, le geste du plaisant devient le symbole même de l'esprit de la France – ce qui conforte l'idée que Baudelaire n'a haï Bruxelles que pour mieux détester Paris.<br />
<br />
Et ce qui redit par l'usage ce que le poème disait par les non-dits: que l'oppression des bêtes ne vaut pas mieux ni pire que l'oppression des hommes. Elle dérive du même.<br />
<br />
<i><span class="Apple-style-span" style="color: #cccccc;">Exit la trouvaille belge au minuit d'un jour de mai</span></i><br />
<br />l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-14364040989193708272013-11-12T15:04:00.004+01:002013-11-12T15:04:55.317+01:00Baudelaire-Flaubert par George Sand<div style="text-align: center;">
<a href="http://books.google.de/books?id=SU90B6gztRwC&dq=spiritualiste%20philosophe%20%22lyrisme%22&hl=fr&pg=PA317&ci=85%2C1079%2C764%2C283&source=bookclip"><img src="http://books.google.de/books?id=SU90B6gztRwC&hl=fr&hl=fr&pg=PA317&img=1&zoom=3&sig=ACfU3U2f_CrZ-9j856Ij8V61yTAbJ9tHIA&ci=85%2C1079%2C764%2C283&edge=0" /></a>
<a href="http://books.google.de/books?id=SU90B6gztRwC&dq=spiritualiste%20philosophe%20%22lyrisme%22&hl=fr&pg=PA318&ci=143%2C73%2C797%2C1285&source=bookclip"><img src="http://books.google.de/books?id=SU90B6gztRwC&hl=fr&hl=fr&pg=PA318&img=1&zoom=3&sig=ACfU3U2ZoZd2e6yBUco8TWF4yRGWPRu-Tg&ci=143%2C73%2C797%2C1285&edge=0" /></a></div>
<div style="text-align: right;">
George Sand, <span style="color: #0000ee;">“</span>Rimes neuves et vieilles”, <i>Revue du XIXe siècle,</i> Paris, 1846, <a href="http://books.google.de/books?id=SU90B6gztRwC&pg=PA318#v=onepage&q&f=false">p. 317-318</a>. </div>
<br />
Changer le sonnet de Souvestre par<i> </i>quelques poèmes des<i> Fleurs du mal</i>, voire par quelques pages de <i>La Tentation de saint Antoine</i>, relire et garder la conclusion.<br />
<br />
<span style="color: #cccccc;"><i>Excipiunt les lyristes malgré eux</i></span><br />
l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-3129774049153744642012-12-18T23:02:00.002+01:002012-12-18T23:05:03.394+01:00Flaubert at work ?<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<iframe allowfullscreen='allowfullscreen' webkitallowfullscreen='webkitallowfullscreen' mozallowfullscreen='mozallowfullscreen' width='320' height='266' src='https://www.youtube.com/embed/FFKM9r4eyCg?feature=player_embedded' frameborder='0'></iframe></div>
<br />
<br />
Dans<i> Yellow scream</i> (2012), parodie de leçons télévisuelles par Kim Beon, un homme en chemise grise explique comment chaque hurlement poussé en posant le pinceau sur la toile s’incorpore au tableau.<br />
<br />
En anglais:<br />
<br />
“The technique to this painting is to incorporate the sound of screams into the brush strokes. [...] A brush stroke done with screaming is very different from a normal one. [...] The effect of the screams is recorded with the brush strokes.” (Cf. <a href="http://blogs.walkerart.org/visualarts/2012/12/06/now-streaming-kim-beoms-yellow-scream-2012/">ici</a>)<br />
<br />
En français:<br />
<br />
« La technique utilisée pour cette peinture est d'incorporer le son du hurlement dans les coups de pinceaux [...] un coup de pinceau donné avec un cri est très différent d'un coup de pinceau normal. L'effet du cri est enregistré dans tous les coups de pinceau. » (Cf. <a href="http://next.liberation.fr/arts/2012/12/18/peinture-hurlante_868476">là</a>)<br />
<br />
<br />
Voilà, posé en quelques touches, le problème du lyrisme flaubertien.<br />
<br />
<i><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;">Excipit le gueuloir de Séoul</span></i><br />
<br />
<br />l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-31932032665174681312012-12-10T18:18:00.000+01:002012-12-11T21:46:17.510+01:00Rue d’un mort, y mourirDans <i>Salammbô</i>, avant même que la guerre n’éclate, les Baléares de Zarxas sont massacrés par la population de Carthage :<br />
<br />
<blockquote class="tr_bq">
C’était une troupe de trois cents frondeurs débarqués de la veille, et qui, ce jour-là, avaient dormi trop tard. Quand ils arrivèrent sur la place de Khamon, les Barbares étaient partis et ils se trouvaient sans défense, leurs balles d'argile ayant été mises sur les chameaux avec le reste des bagages. On les laissa s'engager dans la rue de Satheb, jusqu’à la porte de chêne doublée de plaques d'airain ; alors le peuple, d’un seul mouvement, s’était poussé contre eux.</blockquote>
On peut se demander pourquoi les soldats meurent dans cette rue. Sur GoogleBooks, et une fois les erreurs de numérisation écartées, il n’y a qu’une seule occurrence de ce mot, un anthroponyme tiré d’un ouvrage au nom suggestif, et que Flaubert connaissait bien : <i>Toison d'or de la langue phénicienne</i>, par l’abbé Bourgade (Paris, 1836). Flaubert l’a extrait d’une inscription funéraire transcrite à la <a href="http://books.google.de/books?id=PqpEAAAAcAAJ&pg=PA36&dq=%22satheb%22&hl=de&sa=X&ei=LRXGUPOVM8brsgbf54GwBA&ved=0CEAQ6AEwBQ#v=onepage&q=%22satheb%22&f=false">page 36</a> :<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;">
<a href="http://books.google.de/books?id=PqpEAAAAcAAJ&hl=de&hl=de&pg=PA36&img=1&zoom=3&sig=ACfU3U3QY5finjl2qBX6iO94nQZhG-xwug&ci=79%2C1095%2C889%2C74&edge=0" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="26" src="http://books.google.de/books?id=PqpEAAAAcAAJ&hl=de&hl=de&pg=PA36&img=1&zoom=3&sig=ACfU3U3QY5finjl2qBX6iO94nQZhG-xwug&ci=79%2C1095%2C889%2C74&edge=0" width="320" /></a></div>
<br />
“Cippe du tombeau de Sathleb, fils de Makla”. Sathleb est le nom d’un mort, et c’est tout ce qu’on sait de ce nom : qu’un homme le porta et mourut. Flaubert baptise sa rue du nom d’un mort qui n’est plus connu que par une unique une stèle punique, qui n’est resté dans la mémoire des hommes que parce que d’autres hommes ont voulu un jour s’en souvenir. De ce constat, trois choses:<br />
<br />
– Flaubert reconstruit Carthage non seulement avec des briques empruntées à ses ruines, mais à des cippes : à des briques qui portaient dans leur fonction ce pour quoi l’écrivain les emploie. L’édifice commémoratif est construit de pierres commémoratives (Mise en abyme du geste d’écriture, etc.)<br />
<br />
– Comme souvent, Flaubert narrativise non seulement ce qu’il extrait des documents, mais le contexte discursif dans lequel il trouve ce qu’il compte recycler.<br />
<br />
– Les Baléares de Zarxas meurent rue d’un homme mort.<br />
<br />
<i><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;">Excippiunt les frondeurs Baléares</span></i><br />
<br />
<br />l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-48248669438081257602012-06-26T11:36:00.001+02:002012-06-26T11:36:14.999+02:00Tronçons coupés, bis : on en revient toujours à Victor HugoJ’ignore si Pichois le signale et je n'ai pas mon Baudelaire ici,<br />
<br />
<div style="text-align: center;">
Mais j’aurais plutôt dû lire les <i>Orientales</i></div>
<div style="text-align: center;">
Où l’on trouve un poème intitulé <i><a href="http://books.google.de/books?id=yXwTAAAAQAAJ&dq=les%20djinns%20victor%20hugo&hl=fr&pg=PA177#v=onepage&q&f=false">tal qual</a></i></div>
<div style="text-align: left;">
<br /></div>
<div style="text-align: left;">
<i><span class="Apple-style-span" style="color: #cccccc;">Excipit le <a href="http://hircocerf.blogspot.de/2011/05/troncons-coupes.html">retour</a> du tronçonneur d'ovipare</span></i></div>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-63249200274540700932012-04-30T17:52:00.004+02:002012-04-30T17:56:52.297+02:00Mesure au beau de l’air du tempsComme toute plume dont la sub-version – c'est-à-dire la ré-écriture – constitue bien souvent la force qui l’anime, il faut mesurer Baudelaire à l’aune des mauvais poèmes de son temps. Voici onze hémistiches d’<a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k57065112/f45.image.r=lirisme.hl.langFR">une satire</a> d’Émile Négri dirigée contre les Jeux Floraux.<br />
<br />
<span class="Apple-style-span" style="font-size: x-small;">(Pour en apprécier l’ironie, et celle du sort, il faut rappeler que le lys d’argent récompensait <a href="http://jeuxfloraux.fr/8.html">traditionnellement</a> la catégorie des hymnes à la vierge, mais qu’un lys d’or pouvait, par extraordinaire, récompenser une ode royaliste. Un certain Victor Hugo l’obtint en 1819, contre un certain Alphonse de Lamartine)</span><br />
<br />
<blockquote class="tr_bq">
C'est notoire: jamais un célèbre poète<br />
N’a voulu concourir à ce semblant de fête<br />
Et jamais écrivain, vainqueur des Jeux Floraux,<br />
N’a passé l’horizon des recueils spéciaux.<br />
Voulez-vous être sûr du lis ? A la madone<br />
Dédiez un sonnet.</blockquote>
<i><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;">Excipiunt les madones liliales</span></i>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-26124384138067348782012-04-26T15:57:00.001+02:002012-04-26T15:57:55.697+02:00Travailler plus pour gagner plus, ou ce qui n'a de nom qu'en enfer<span class="Apple-style-span" style="line-height: 19px;"></span><br />
<blockquote class="tr_bq">
<span class="Apple-style-span" style="font-family: inherit; font-size: x-small;">Au commencement, le travail n’était pas nécessaire à l’homme pour vivre : la terre fournissait d’elle-même à tous ses besoins.<br />Mais l’homme fit le mal ; et comme il s’était révolté contre Dieu, la terre se révolta contre lui.<br />Il lui arriva ce qui arrive à l’enfant qui s’élève contre son père ; le père lui retire son amour, et il l’abandonne à lui-même ; et les serviteurs de la maison refusent de le servir, et il s’en va cherchant çà et là sa pauvre vie, en mangeant le pain qu’il a gagné à la sueur de son visage.<br />Depuis lors donc, Dieu a condamné tous les hommes au travail, et tous ont leur labeur, soit du corps, soit de l’esprit ; et ceux qui disent : Je ne travaillerai point, sont les plus misérables.<br />Car comme les vers dévorent un cadavre, les vices les dévorent, et si ce ne sont les vices, c’est l’ennui.<br />Et quand Dieu voulut que l’homme travaillât, il cacha un trésor dans le travail, parce qu’il est père, et que l’amour d’un père ne meurt point.<br />Et celui qui fait un bon usage de ce trésor, et qui ne le dissipe point en insensé, il vient pour lui un temps de repos, et alors il est comme les hommes étaient au commencement.<br />Et Dieu leur donna encore ce précepte : Aidez-vous les uns les autres, car il y en a parmi vous de plus forts et de plus faibles, d’infirmes et de bien portants ; et cependant tous doivent vivre.<br />Et si vous faites ainsi, tous vivront, parce que je récompenserai la pitié que vous aurez eue pour vos frères, et je rendrai votre sueur féconde.<br />Et ce que Dieu a promis s’est vérifié toujours, et jamais on n’a vu celui qui aide ses frères manquer de pain.<br />Or, il y eut autrefois un homme méchant et maudit du ciel. Et cet homme était fort, et il haïssait le travail ; de sorte qu’il se dit : Comment ferai-je ? Si je ne travaille point, je mourrai, et le travail m’est insupportable.<br />Alors il lui entra une pensée de l’enfer dans le cœur. Il s’en alla de nuit, et saisit quelques-uns de ses frères pendant qu’ils dormaient, et les chargea de chaînes.<br />Car, disait-il, je les forcerai, avec les verges et le fouet, à travailler pour moi, et je mangerai le fruit de leur travail.<br />Et il fit ce qu’il avait pensé, et d’autres, voyant cela, en firent autant, et il n’y eut plus de frères, il y eut des maîtres et des esclaves.<br />Ce jour fut un jour de deuil sur toute la terre.<br />Longtemps après il y eut un autre homme plus méchant que le premier et plus maudit du ciel.<br />Voyant que les hommes s’étaient partout multipliés, et que leur multitude était innombrable, il se dit :<br />Je pourrais bien peut-être en enchaîner quelques-uns et les forcer à travailler pour moi ; mais il les faudrait nourrir, et cela diminuerait mon gain. Faisons mieux ; qu’ils travaillent pour rien ! ils mourront, à la vérité ; mais comme leur nombre est grand, j’amasserai des richesses avant qu’ils aient diminué beaucoup, et il en restera toujours assez.<br />Or, toute cette multitude vivait de ce qu’elle recevait en échange de son travail.<br /><b>Ayant donc parlé de la sorte, il s’adressa en particulier à quelques-uns, et il leur dit : Vous travaillez pendant six heures, et l’on vous donne une pièce de monnaie pour votre travail :<br />Travaillez pendant douze heures, et vous gagnerez deux pièces de monnaie, et vous vivrez bien mieux, vous, vos femmes et vos enfants.<br />Et ils le crurent.<br />Il leur dit ensuite : Vous ne travaillez que la moitié des jours de l’année : travaillez tous les jours de l’année, et votre gain sera double.<br />Et ils le crurent encore.<br />Or, ils arriva de là que la quantité de travail étant devenue plus grande de moitié, sans que le besoin de travail fût plus grand, la moitié de ceux qui vivaient auparavant de leur labeur ne trouvèrent plus personne qui les employât.<br />Alors l’homme méchant, qu’ils avaient cru, leur dit : Je vous donnerai du travail à tous, à la condition que vous travaillerez le même temps, et que je ne vous payerai que la moitié de ce que je vous payais : car je veux bien vous rendre service, mais je ne veux pas me ruiner.<br />Et comme ils avaient faim, eux, leurs femmes et leurs enfants, ils acceptèrent la proposition de l’homme méchant, et ils le bénirent : car, disaient-ils, il nous donne la vie.<br />Et, continuant de les tromper de la même manière, l’homme méchant augmenta toujours plus leur travail, et diminua toujours plus leur salaire.</b><br />Et ils mouraient faute du nécessaire, et d’autres s’empressaient de les remplacer, car l’indigence était devenue si profonde dans ce pays, que les familles entières se vendaient pour un morceau de pain.<br />Et l’homme méchant, qui avait menti à ses frères, amassa plus de richesses que l’homme méchant qui les avait enchaînés.<br />Le nom de celui-ci est Tyran ; l’autre n’a de nom qu’en enfer.</span></blockquote>
(Lamenais, <i>Paroles d’un croyant</i>, 1834)l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-8621317055642870822012-04-22T11:04:00.001+02:002012-04-22T11:04:28.135+02:00Articles annoncés tu n'omettras pas d'écrirePrétérition sucrée à la fin d’un article:<br />
<br />
<blockquote class="tr_bq">
Malheureusement, le titre d’ensemble qui jusqu’à présent pouvait à peu près réunir ces divers aspects de l’incipit franco-allemand, ne convient plus guère à une perspective où se devinent de nouvelles langues et de nouvelles façons d’arpenter un désert. Notre contribution au dossier s’arrête donc ici, mais pour reprendre ailleurs, au revers d’un triptyque à désormais quatre volets, ou plutôt : au bord d’un nouveau « chemin qui se bifurque » : selon que la traduction sépare les deux œuvres ou les réunit, selon que ces deux œuvres se regardent de part et d’autre du traduire, ou qu’un traduire ne les tisse en un texte unique, selon que les langues étrangères ne se retirent dans la Thébaïde de l’une ou que la langue française ne se mette à bourdonner sur le boulevard de l’autre, selon que le Diable traduise par anticipation le 33 de la Bêtise, ou que *<i>Deux Cloportes au désert</i> ne soit rien d’autre que les premières <i>Tentations</i> retraduites.</blockquote>
Tout ça pour ça:<br />
<br />
<div style="text-align: center;">
« Quelques langues au désert. La traduction de <i>Saint Antoine</i>, et dans <i>Bouvard et Pécuchet</i> »</div>
<div style="text-align: center;">
<br /></div>
<div style="text-align: center;">
<i>vs</i>. </div>
<div style="text-align: center;">
<br /></div>
<div style="text-align: center;">
« Du cochon de l’ermite aux cloportes du désert. <i>Bouvard et Pécuchet</i> traduit de <i>Saint Antoine</i> »
</div>
<div style="text-align: center;">
<br /></div>
<i><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;">Excipit Que les titres soient, et les titres fusent</span></i><br />
<br />
<br />l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-2783915938257086712012-04-21T14:51:00.002+02:002012-04-22T11:05:00.327+02:00BP, dernière tentation d’A<br />
Une note (supprimée d’un article) à recycler un jour :<br />
<blockquote class="tr_bq">
Comme il faisait une chaleur de trente-trois degrés, le boulevard Bourdon se trouvait absolument désert. Plus bas le canal Saint-Martin, fermé par les deux écluses étalait en ligne droite son eau couleur d’encre. Il y avait au milieu, un bateau plein de bois, et sur la berge deux rangs de barriques.
Au delà du canal, entre les maisons que séparent des chantiers, le grand ciel pur se découpait en plaques d’outremer, et sous la réverbération du soleil, les façades blanches, les toits d’ardoises, les quais de granit éblouissaient. Une rumeur confuse montait du loin dans l’atmosphère tiède ; et tout semblait engourdi par le désœuvrement du dimanche et la tristesse des jours d’été. Deux hommes parurent.</blockquote>
On trouverait dans Saint Antoine des hallucinations similaires. Et le début du dernier roman semble vouloir faire de Bouvard et de Pécuchet une dernière vision d’Antoine.<br />
<br />
Il faudrait là encore entrer dans les détails et montrer comment Flaubert joue sur deux traditions mélancoliques différentes, l’une, fameuse, qui vient du corpus hippocratique, et qui définit la mélancolie comme un état persistant de crainte ou de tristesse, et l’autre, moins connue, qui vient d’Arétée de Cappadoce et qui définit la mélancolie comme un délire partiel, une idée fixe, source de visions. Sur cette distinction, et d’autres, voir à nouveau <a href="http://www.fabula.org/actualites/l-cantagrel-de-la-maladie-a-l-ecriture-genese-de-la-melancolie-romantique_24384.php">l’ouvrage de Laurent Cantagrel</a>, dont la première partie est un parfait manuel de « mélancologie » médicale, théologique et littéraire. À propos de cette dernière définition de la mélancolie, Cantagrel note ainsi que ce « délire partiel [est] accompagné, ou non, d’un sentiment de tristesse et de crainte. Et les médecins rapporteront avec complaisance des exemples frappants de ces idées délirantes, formant tout un répertoire de figures pittoresques que l’on recopie d’un traité à l’autre et qui inspirera nombre de figures littéraires dominées par leur chimère, au premier rang desquelles Don Quichotte et son amour de la chevalerie errante » (p. 26). On imagine parfaitement Bouvard et Pécuchet reconduire cette complaisance et se lire à haute voix ces exemples pittoresques recopiés d’un traité l’autre. Et l’on comprend mieux le partage qui peut être fait d’une œuvre à l’autre, tandis qu’un même amour de la pensée errante travaille les trois protagonistes : acédie pour Antoine, et idée fixe pour Bouvard et Pécuchet. Deux formes de délires partiels, accompagnés, ou non, de crainte et de tristesse.l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-11802847587453934862012-03-26T10:39:00.001+02:002012-03-26T10:40:24.541+02:00Antoine, Athanase, La Rivière et le CanivetNote supprimée d’un article :<br />
<br />
<blockquote class="tr_bq">De façon significative, Athanase est présent – dans des contextes différents – dans les première et dernière versions d’<i>Antoine</i>, mais il brille par son absence dans la seconde, quand Flaubert la reprend aussitôt après avoir publié <i>Madame Bovary</i> (où le père est à la fois La Rivière et le Canivet). Au contraire, dans la dernière, on le voit appeler Antoine à l’aide, dans les toutes premières pages de l’œuvre : « Une autre fois, Athanase m’appela pour le soutenir contre les ariens. Tout s’est borné à des invectives et à des risées. Mais, depuis lors, il a été calomnié, dépossédé de son siège, mis en fuite. Où est-il, maintenant ? Je n’en sais rien ! On s’inquiète si peu de me donner des nouvelles ! Tous mes disciples m’ont quitté, Hilarion comme les autres ! » (TSA, 54). On est tenté, en lisant cela de voir Antoine entre père et fils. Père ou grand frère, d’ailleurs, mais frère semblable au père : médecin, actif, impliqué dans le monde médical comme l’autre l’est dans la sinécure littéraire. Bref, on peut rêver à un cryptage biographique de cette aide apportée par le saint ermite à l’évêque. Du reste, cette promotion d’Athanase en père naturel de Bouvard est intéressante aussi en cela : Antoine et Athanase étaient davantage perçus comme deux égaux, deux compagnons illustrant les deux versants de la vie en Dieu : le zèle prosélyte pour l’évêque d’Alexandrie, vainqueur des Ariens hérétiques au concile de Nicée, et la vie monacale pour l’ermite vainqueur des démons tentateurs en sa retraite désertique.<br />
Enfin, dernière pièce à verser au dossier d’une lecture psychanalytique, cette interjection d’Antoine, dans la seule version de 1874, deux ans après la mort du père :<br />
« Oh ! Non ! ... non ! à chaque minute je défaille ! Que ne suis-je un de ceux dont l’âme est toujours intrépide et l’esprit ferme, comme le grand Athanase, par exemple. » (TSA, 88). Mais il est sans doute tout aussi judicieux d’y voir une allusion projective, mais consciente, aux doutes qui parfois assaillent les solitaires attelés aux tâches de l’esprit, et au regard furtif qu’ils jettent alors sur ceux de leurs contemporains qui leur paraissent moins seuls et plus actifs.</blockquote>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-9307106363302727292012-02-03T10:26:00.004+01:002012-02-03T10:29:31.536+01:00Delenda est SalammbôJ'ignore si ceci a été relevé.<br />
<br />
Voici la notice consacrée à Salambo dans une « Histoire des Babyloniens », que l'on trouve dans une <i>Histoire universelle depuis le commencement du monde jusqu’à présent. Traduite de l’anglais d’une société de gens de lettres</i>, t. 3, Amsterdam et Leipzig, 1767, <a href="http://books.google.de/books?id=eylKAAAAcAAJ&lpg=PA249&ots=KZWZs1HlVV&pg=PA249#v=onepage&q=salambo&f=false">p. 249</a> :<br />
<blockquote class="tr_bq"><i>Salambo</i> étoit aussi une Déesse des <i>Assyriens</i> ou des <i>Babyloniens</i>, & la même qu'<i>Astarté,</i> ou quelqu’une des autres Déesses, qui ont été prouvées être les memes qu'<i>Astarté </i>; mais nous faisons particulièrement mention de cette dernière, parce que <i>Salambo,</i> ou <i>Salambas</i>, étoit une Déesse qui promenoit partout sa tristesse, en pleurant son cher <i>Adonis,</i> & c'est tout ce que nous avons à en dire.</blockquote>On appréciera, pour baptiser une dévote de la lune, le choix d'une déesse mélancolique. Mais on remarquera que le nom même de <i>Salammbô </i>portait en lui l'impossibilité d'un discours sur Carthage, et le défi de sa reconstruction, et c’est tout ce que nous avons à en dire.l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-511646768952627492011-06-01T13:16:00.001+02:002011-06-01T13:16:32.696+02:00cocoricroc<blockquote>while Dracula provided the literary archetype of the male vampire, Clarimonde provided the literary archetype of the female vampire</blockquote><span style="font-size: xx-small;">Brian Stableford, "La Morte Amoureuse", in <i>Encyclopedia of the Vampire: The Living Dead in Myth, Legend, and Popular Culture</i>, dir. S.T. Joshi, ABC-CLIO, 2010, <a href="http://books.google.fr/books?id=CaqE82YIh4QC&lpg=PA232&dq=vampire%20poe&pg=PA214#v=snippet&q=dracula%20clarimonde&f=false">p. 214</a>.</span><br />
<div style="color: #999999;"><i><br />
</i></div><i style="color: #999999;">Excipit la référence à ne pas noyer dans le web</i>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-16544600910819461342011-05-26T17:29:00.001+02:002011-05-26T17:55:34.613+02:00Tronçons coupésClaude Pichois a depuis longtemps fait remarquer que les tronçons de serpent coupé à quoi le Spleen de Paris est comparé par Baudelaire dans sa lettre-dédicace, était une image issue de la jeunesse romantique de l'auteur. Voici un petit sac (ce billet) où jeter pèle-mêle quelques occurrences :<br />
<br />
1) Byron, Marino Faliero, Le Doge de Venise (éd. Nodier, 1822) :<br />
<br />
<blockquote>Dans l'édition Nodier (<a href="http://books.google.fr/books?id=i_cdAAAAMAAJ&pg=PA293">1822</a>):<br />
CALENDARO<br />
Oui, cette pitié que méritent les tronçons divisés de la vipère mise en pièces qui s'agitent encore avec la dernière énergie du venin. Autant j'aimerais avoir pitié d'une des dents du reptile, que d'épargner un de ces patriciens. Ils sont tous les anneaux d'une longue chaîne. Ils ne forment qu'une masse, une vie, un corps. Ils mangent, ils boivent, ils vivent et s'unissent entre eux ; ils oppriment, ils égorgent de concert. Qu'ils meurent ensemble et du même coup.</blockquote><br />
Et dans celle de Laroche (1836) :<br />
<blockquote>Calendaro<br />
Oui, une pitié comme celle que méritent et qu'obtiennent les tronçons séparés de la vipère coupée en morceaux, alors que dans la dernière énergie d'une vie venimeuse, ils tressaillent au soleil d'un mouvement convulsif. Moi, en sauver un seul ! j'aimerais autant épargner une des dents du serpent : ce sont tous les anneaux d'une même chaîne ; ils ne forment qu'une masse, qu'une, vie qu'un corps ; ils boivent, mangent, vivent et procréent ensemble ; ils prennent leurs ébats, mentent, oppriment et tuent de concert ; – qu'ils meurent donc tous à la fois !</blockquote><br />
2) Paul de Saint Victor, dans <i>La Presse</i> (<a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k476970b.image">3 juin 1855</a>), à propos d'Alfieri :<br />
<blockquote>Que de vie nerveuse, dans ces vers concis, brisés tordus par l'ellipse, fendus en deux par de tranchantes répliques, qui s'agitent, se cherchent, se rejoignent, comme des tronçons de serpent coupé.</blockquote>(le passage en précède un autre que Flaubert avait retranscrit pour<a href="http://books.google.fr/books?ei=PE3eTa_BAoq08QPF7JGTCg&ct=result&id=y6kOAQAAIAAJ&dq=%22Danton+%C3%A9tait+un+lyrique+ayant+fait+son+ode%22&q=lyre#search_anchor"> le second volume</a> de <i>Bouvard et Pécuchet</i>).<br />
<br />
L'intérêt de cette occurrence est l'application de l'image au vers dramatique (la Pléïade donne une occurrence prose/poésie).<br />
<br />
3) Les muscles de Mâtho, dans <i>Salammbô</i>, ressemblent à un serpent coupé.<br />
<br />
4) L'image était bien plus ancienne, on la trouve dans les lettres et les écrits polémiques de Voltaire, tantôt appliquée par Voltaire <a href="http://books.google.fr/books?id=oEY0AAAAMAAJ&pg=PA42&dq=%22vip%C3%A8re+coup%C3%A9e+en+morceaux%22&hl=fr&ei=umveTbrZJ4qu8gP4gaGCCg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=4&ved=0CDoQ6AEwAw#v=onepage&q=%22vip%C3%A8re%20coup%C3%A9e%20en%20morceaux%22&f=false">aux jésuites</a> :<br />
<blockquote>Qui croirait que les jésuites eussent encore le pouvoir de nuire , et que cette vipère coupée en morceaux pût mordre dans le seul trou qui lui reste ? </blockquote>et tantôt <a href="http://books.google.fr/books?id=-EhhTkPP0KkC&pg=PA59&dq=%22vip%C3%A8re+coup%C3%A9e+en+morceaux%22&hl=fr&ei=umveTbrZJ4qu8gP4gaGCCg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=6&ved=0CEUQ6AEwBQ#v=onepage&q=%22vip%C3%A8re%20coup%C3%A9e%20en%20morceaux%22&f=false">à Nonotte</a> :<br />
<blockquote>Vous voyez que les membres épars de la vipère coupée en morceaux, ont encore du venin.</blockquote>Remarque, chez Byron aussi il s'agira de vipère. Ce qui fait soupçonner une origine naturaliste ?<br />
Et en effet :<br />
<br />
5) Dans son <i>Histoire des sciences médicales</i> (<a href="http://books.google.fr/books?id=ii5FAAAAcAAJ&pg=PA989&dq=%22vip%C3%A8re+coup%C3%A9e+en+morceaux%22&hl=fr&ei=umveTbrZJ4qu8gP4gaGCCg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0CCsQ6AEwAA#v=onepage&q=%22vip%C3%A8re%20coup%C3%A9e%20en%20morceaux%22&f=false">Paris, 1870</a>), Daremberg semble confirmer l'origine naturaliste antique de ce trait vipérin :<br />
<blockquote>Séverin a encore publié, en 1650, à Padoue, un volume intitulé : <i>Vipera pythia, id est de viperae natura, veneno, medicina, demonstrationes et experimenta nova,</i> en trois livres. Dans le premier, l'auteur étudie la nature, à la fois terrestre et céleste, de la vipère, les causes de ses vertus alexitères, ses mœurs, ses habitudes. Il signale la puissance vitale que conservent les tronçons d'une vipère coupée en morceaux ; il étudie son mode de génération (<i>vivipare ; ovovipare</i> aurait-il dû dire) ; sa structure, les histoires plus ou moins fabuleuses qu'on avait débitées ou qu'on débitait encore sur son compte. Dans le second livre, il recherche les sources et le siége du poison de la vipère. Le troisième est consacré à la préparation et aux propriétés de la thériaque.</blockquote>CONCLUSIONS PROVISOIRES<br />
<br />
- Le motif du serpent coupé, que l'on trouverait sans doute dans la poésie latine, dans les Géorgiques, par exemple, voire dans la patristique, semble s'être un temps fixé autour de la vipère, et pour signifier que même coupée en tronçons, la vipère restait dangereuse.<br />
<br />
- Cette remarque confirme le danger latent au cœur de l'offrande baudelairienne, le serpent d'ironie qui, bien que tranché, haché, cache encore son venin sous les fleurs de rhétorique.<br />
<br />
<i style="color: #cccccc;">Excipit le petit sac venimeux</i>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com1tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-74782461428534650242011-05-26T10:41:00.003+02:002011-05-26T10:44:23.329+02:00Gentleman vampireUne application (plus rare qu'il n'y paraît) du vampirisme masculin :<br />
<br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg6o4Swo71ZDO43zaZIV2LSP2NXG3KfDdlhSZfwAZ_a3UVBAMJpWDQB2Kg9JAoLl0MaQR7Wa2oLuI4KAgHwx78QbIFrq270ajfOUIZnZ8KJBB3P60nsLL5FdWcs5mSpiSs4IJo_-DAgWENL/s1600/gentleman_vampire.png" imageanchor="1" style="margin-left: 1em; margin-right: 1em;"><img border="0" height="400" src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEg6o4Swo71ZDO43zaZIV2LSP2NXG3KfDdlhSZfwAZ_a3UVBAMJpWDQB2Kg9JAoLl0MaQR7Wa2oLuI4KAgHwx78QbIFrq270ajfOUIZnZ8KJBB3P60nsLL5FdWcs5mSpiSs4IJo_-DAgWENL/s400/gentleman_vampire.png" width="212" /></a></div><br />
<div class="separator" style="clear: both; text-align: center;"></div>parue dans <a href="http://books.google.fr/books?id=KIICAAAAIAAJ&pg=PA174&dq=vampyre+inauthor:poe&hl=fr&ei=8PqlTcDpNIrT4wa5qZTCCg&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0CCoQ6AEwAA#v=snippet&q=%22vampyre%20love%22&f=false"><i>The Gentleman's magazine</i></a> (juillet-décembre 1837).<br />
<br />
A rapprocher des "Pervers narcissiques : Vampires des temps modernes" (<a href="http://forum.doctissimo.fr/psychologie/amour/narcissiques-modernes-vampires-sujet_174867_1.htm">Doctissimo</a> dixit)<br />
<div style="color: #cccccc;"><i><br />
</i></div><i style="color: #cccccc;">Excipit le vampire peu galant</i>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-63023321263016524392011-05-20T12:09:00.000+02:002011-05-20T12:09:49.904+02:00Julien et DalilaDans l'église qui est le théâtre de son premier meurtre, c'est en chat que le futur saint Julien abat sa baguette comme une griffe sur une souris blanche aux mouvements trop déliés pour le corps contraint du garçon en prière. Ce geste félin inverse l'ombre portée d'une scène qui figurait sur les carreaux colorés d'un vitrail, dans les brouillons du conte : un vitrail représentant Samson en proie avec le lion biblique.<br />
<br />
Rappelons que Samson, en Hercule vétérotestamentaire, avait déchiré un lion à mains nues, puis passé son chemin. Revenant dans les parages quelques temps plus tard, il avait entrevu un essaim d'abeille dans les entrailles du lion, en avait récolté le miel et l'avait donné à manger à ses parents sans en indiquer l'origine. A quelques temps de là, ayant pris femme parmi "les filles des Pelichtime, ces incirconcis", il proposa aux invités de résoudre l'énigme suivante, que lui avait inspiré l'essaim d'abeilles dans les entrailles du lion:<br />
<blockquote>Du mangeur est venu l'aliment et du fort est procédé la douceur. <span style="font-size: xx-small;">(Juges, 14, 14, <a href="http://books.google.fr/books?id=kww2AAAAMAAJ&pg=PR88&lpg=PR88&#v=onepage&q&f=false">Bible de Cahen</a>)</span></blockquote>La trahison des Pélichtime provoquera la colère de Samson. Mais on comprend pourquoi Flaubert a songé un instant à baigner le premier crime de Julien dans la lumière de Samson, puisque du cruel chasseur - lion miniature - devra procéder la douceur du saint, miel du Seigneur.<br />
<br />
L'anecdote était bien connue du XIXe siècle, qui l'avait notamment recyclé dans la querelle de la génération spontanée : ainsi Pouchet, principal tenant de cette théorie, et ami de Flaubert, reproduisait l'anecdote dans son <i>Hétérogénésie</i> <span style="font-size: xx-small;">(sur le sujet, voir l'excellent article d'Agnès Bouvier, incessamment sous peu <a href="http://flaubert.revues.org/index1323.html">en ligne</a>)</span>. <br />
<br />
Flaubert, cependant, ne retiendra pas le motif du vitrail prédictif. Julien ne sera pas lion, mais loup : cœur féroce. Outre les prolongements animaux de la personnalité de Julien, il y a peut-être une autre raison à la disparition du vitrail. De fait, il était peut-être à craindre que le nom de Samson impliquât la légende plus célèbre encore de Dalila, c'est-à-dire d'Omphale, de Judith, de la femme fatale venant à bout du guerrier invincible. Et s'il fallait chercher une Dalila dans <i>Trois contes</i>, certes ce ne serait pas dans l'histoire de Julien qui n'a d'autre ennemi que lui-même et dont la femme n'est que le déclencheur involontaire du parricide, mais dans celle d'Hérodias, femme qui vient à bout de l'homme dédoublé en deux figures gémellaires : le lion rugissant (Jean-Baptiste) et le pleutre puissant (Hérode). Or, il semble bien que l'ombre de Samson, qui devait couvrir la première scène du crime du petit Julien, ait été déplacé sur les plaines de la Galilée, sous l'œil mélancolique d'Hérode accoudé au parapet de sa forteresse :<br />
<blockquote>Les montagnes, immédiatement sous lui, commençaient à découvrir leurs crêtes, pendant que leur masse, jusqu'au fond des abîmes, était encore dans l'ombre. Un brouillard flottait, il se déchira, et les contours de la mer Morte apparurent. L'aube, qui se levait derrière Machaerous, épandait une rougeur. Elle illumina bientôt les sables de la grève, les collines, le désert, et, plus loin, tous les monts de la Judée, inclinant leurs surfaces raboteuses et grises. Engaddi, au milieu, traçait une barre noire ; Hébron, dans l'enfoncement, s'arrondissait en dôme ; Esquol avait des grenadiers, Sorek des vignes, Karmel des champs de sésame ; et la tour Antonia, de son cube monstrueux, dominait Jérusalem. Le Tétrarque en détourna la vue pour contempler, à droite, les palmiers de Jéricho ; et il songea aux autres villes de sa Galilée : Capharnaüm, Endor, Nazareth, Tibérias où peut-être il ne reviendrait plus. Cependant le Jourdain coulait sur la plaine aride. </blockquote>Tout le conte tient dans cette paroi rocheuse de noms inconnus, quoique familiers. Le lecteur est transporté dans l'ignorance de ce qu'il croit connaître, les paysages bibliques au temps du Sauveur, rendus à leur irréductible étrangeté : toute édition des <i>Trois contes</i> connaît une explosion des notes pour conduire le lecteur dans le désert du dernier texte. Mais une fois les toponymes glosés, l'un d'entre eux résiste encore :<br />
<blockquote>Il n'existe pas de ville nommée Sorek ; il s'agit en fait d'un torrent qui coule au nord-ouest de Jérusalem. Flaubert avait d'abord écrit Gazer, qui est le nom d'une ville située au nord de Machærous, mais qu'il est impossible d'apercevoir de la citadelle. Flaubert a choisi un nom de deux syllabes. <span style="font-size: xx-small;">(Pierre-Marc de Biasi, éd. GF, note 7, p. 150)</span></blockquote>Or ce nom de deux syllabes apparaît une unique fois dans la Bible, à nouveau dans les <i>Juges</i>, histoire de Samson :<br />
<blockquote>Il arriva après cela qu'il aima une femme dans la vallée de Sorek ; son nom (était) Delila. <span style="font-size: xx-small;">(<i>Juges</i>, 16, 4 - <a href="http://books.google.fr/books?id=kww2AAAAMAAJ&lpg=PR88&pg=PR76#v=onepage&q&f=false">Bible de Cahen</a>)</span></blockquote><i style="color: #999999;">Excipiunt les histoires de cheveux coupés en quatre</i>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-84862153026199413052011-05-20T10:12:00.000+02:002011-05-20T10:12:57.411+02:00Larousse et Pécuchet<blockquote><br />
les <i>encyclopédies</i>, dit-on, répandent une science incomplète, et la répandent au hasard, sans savoir si les esprits sont préparés à la recevoir, quel usage ils en feront, si même ils en ont envie et la demandent ; elles provoquent par là, ou, du moins, elles favorisent une activité intellectuelle intempestive et mal répartie ; elles propagent trop vite dans la société tout entière les idées qui naissent dasn la région supérieure, et qui ne devraient pas en sortir avant d'avoir subi l'épreuve du temps ; elles font ainsi beaucoup de demi-savants, enfantent la présomption, la légèreté des opinions, des études, et tous les défauts qui en résultent pour les individus, et tous les dangers qui en peuvent naître pour les peuples.</blockquote>Pierre Larousse, <i>Encyclopédie</i>, article "Encyclopédie"<br />
<br />
<i style="color: #999999;">Excipit l'encyclopédie farce</i>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-22625588649915085392011-05-11T16:39:00.001+02:002011-05-11T16:41:17.853+02:00Le Frêne et le SerpentDans <i>Saint Julien</i>, au milieu des animaux du désir dangereux, lors de la seconde et nocturne grande chasse qui précède le parricide,<br />
<blockquote>un serpent monta en spirale autour d'un frêne. </blockquote> On pense bien évidemment au serpent de la genèse et sa propension aux enlacements arboricoles. Mais pourquoi un frêne ?<br />
<br />
1°) Parce que Pline rapporte que le Serpent meurt à l'ombre des Frênes. Julien a du mouron à se faire si ce serpent-là est immune.<br />
<br />
2°) Parce que la Luxure, dans la <i>Tentation de Saint-Antoine</i> initiale (1849), a cueilli ses roses "dans la haie, sur le tronc d'un frêne, où s'enlaçait l'églantier", et que dans <i>L'Éducation sentimentale</i>, parmi les essences d'arbres de Fontainebleau, les "frênes courbaient mollement leurs glauques ramures". <br />
<br />
3°) Parce que le bois de frêne était utilisé pour construire des armes de lancer, que "fraxinus" en latin finit par signifier "javelot", qu'on trouve dans Salammbô des "sarisses de frêne" et des "javelot[s] de frêne", enfin que Julien manque sa mère d'un cheveu en jetant sa javeline.<br />
<br />
Et alors ?<br />
<br />
1°) Peut-être.<br />
2°) J'en doute.<br />
3°) Sans doute.<br />
<i style="color: #999999;"><br />
Excipit un détail parmi d'autres</i>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-21646536587685156542011-04-23T13:41:00.010+02:002011-04-23T17:15:19.434+02:00Des femmes, d'après Gustave FlaubertDu reflux d'un article, deux tableaux dont je ne sais que faire :<br />
<br />
<div style="text-align: center;"><b><br />
</b></div><table border="1" bordercolor="#000000" cellpadding="4" cellspacing="0"><col width="55*"></col> <col width="45*"></col> <col width="43*"></col> <col width="42*"></col> <col width="72*"></col> <tbody>
<tr valign="TOP"> <td width="21%"><div align="CENTER"><br />
</div></td> <td width="18%"><div align="CENTER"><b>Serpent</b></div></td> <td width="17%"><div align="CENTER"><b>Vampire</b></div></td> <td width="16%"><div align="CENTER"><b>Sirène</b></div></td> <td width="28%"><div align="CENTER"><b>Dangers de la séduction</b></div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="21%"><div align="CENTER"><b>Marie</b></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(</span><i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">Novembre</span></i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">)</span></div></td> <td width="18%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(cuisses)</span></div></td> <td width="17%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">implicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(morsure au cou)</span></div></td> <td width="16%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">implicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(ventre de nacre)</span></div></td> <td width="28%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(« serpent » et « démon »)</span></div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="21%"><div align="CENTER"><b>Lamie</b></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(</span><i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">TSA 48-74</span></i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">)</span></div></td> <td width="18%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(corps)</span></div></td> <td width="17%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div></td> <td width="16%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">implicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(chant envoûtant)</span></div></td> <td width="28%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(aveu de la vampire)</span></div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="21%"><div align="CENTER"><b>Sirènes</b></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(</span><i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">TSA </span></i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">48-56)</span></div></td> <td width="18%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">implicite ?</span></div></td> <td width="17%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">Ø</span></div></td> <td width="16%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite...</span></div></td> <td width="28%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(caresses + réaction d'Antoine)</span></div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="21%"><div align="CENTER"><b>Emma 1</b></div><div align="CENTER" style="font-style: normal;"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(</span><sup><b><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">G</span></b></sup><i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">Madame Bovary</span></i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">)</span></div></td> <td width="18%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(torsions)</span></div></td> <td width="17%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">implicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(succion du doigt)</span></div></td> <td width="16%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">Ø</span></div></td> <td width="28%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(peur et fascination de Léon)</span></div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="21%"><div align="CENTER"><b>Emma 2</b></div><div align="CENTER" style="font-style: normal;"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(</span><sup><b><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">G</span></b></sup><i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">Madame Bovary</span></i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">)</span></div></td> <td width="18%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(dragon, Scylla)</span></div></td> <td width="17%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><br />
</div></td> <td width="16%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div></td> <td width="28%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(lettre anonyme)</span></div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td height="21" width="21%"><div align="CENTER"><b>Monstre femelle</b></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(</span><i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">Salammbô</span></i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">)</span></div></td> <td width="18%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(queue qui ondule)</span></div></td> <td width="17%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">Ø</span></div></td> <td width="16%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">implicite ?</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(monstre chanté)</span></div></td> <td width="28%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">implicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(chant repris par Mâtho)</span></div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td height="20" width="21%"><div align="CENTER"><b>Rosanette</b></div><div align="CENTER" style="font-weight: normal;"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(</span><i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">L'Educ. Sentim.</span></i><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">)</span></div></td> <td width="18%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">explicite</span></div><div align="CENTER"><span class="Apple-style-span" style="font-size: xx-small;">(bayadère)</span></div><div align="CENTER"><br />
</div></td> <td width="17%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">Ø</span></div></td> <td width="16%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">Ø</span></div></td> <td width="28%"><div align="CENTER"><span style="font-size: x-small;">implicite</span></div></td> </tr>
</tbody></table><b>Tab. 1. - Hybrides</b><br />
<div style="text-align: center;"><b><span class="Apple-style-span" style="font-weight: normal;"><br />
</span></b></div><br />
<br />
<center> <table border="1" bordercolor="#000000" cellpadding="4" cellspacing="0"><col width="79*"></col> <col width="67*"></col> <col width="69*"></col> <col width="41*"></col> <tbody>
<tr valign="TOP"> <td width="31%"><div align="CENTER"><br />
</div></td> <td width="26%"><div align="CENTER"><b>femme-serpent</b></div></td> <td width="27%"><div align="CENTER"><b>femme-vampire</b></div></td> <td width="16%"><div align="CENTER"><b>sirène</b></div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="31%"><div align="CENTER"><i><b>Novembre</b></i></div></td> <td width="26%"><div align="CENTER">oui</div></td> <td width="27%"><div align="CENTER">oui</div></td> <td width="16%"><div align="CENTER">((oui))</div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="31%"><div align="CENTER"><i><b><sup>G</sup>Madame Bovary </b></i> </div></td> <td width="26%"><div align="CENTER">oui</div></td> <td width="27%"><div align="CENTER">oui</div></td> <td width="16%"><div align="CENTER">oui</div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="31%"><div align="CENTER"><i><b>Madame Bovary</b></i></div></td> <td width="26%"><div align="CENTER">(oui)</div></td> <td width="27%"><div align="CENTER">((oui))</div></td> <td width="16%"><div align="CENTER">oui</div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="31%"><div align="CENTER"><i><b>Educ. Sentim.</b></i></div></td> <td width="26%"><div align="CENTER">oui</div></td> <td width="27%"><div align="CENTER">non</div></td> <td width="16%"><div align="CENTER">?</div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="31%"><div align="CENTER"><i><b>Salammbô</b></i></div></td> <td width="26%"><div align="CENTER">OUI</div></td> <td width="27%"><div align="CENTER">non</div></td> <td width="16%"><div align="CENTER">(oui)</div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="31%"><div align="CENTER"><i><b>TSA 48/56</b></i></div></td> <td width="26%"><div align="CENTER">oui</div></td> <td width="27%"><div align="CENTER">OUI</div></td> <td width="16%"><div align="CENTER">OUI</div></td> </tr>
<tr valign="TOP"> <td width="31%"><div align="CENTER"><i><b>TSA 74</b></i></div></td> <td width="26%"><div align="CENTER">oui</div></td> <td width="27%"><div align="CENTER">OUI</div></td> <td width="16%"><div align="CENTER">((oui))</div></td></tr>
</tbody></table></center><br />
<div style="text-align: left;"><b><span class="Apple-style-span" style="white-space: pre;"> </span>Tab. 2. - Quel monstre pour quel roman ? </b></div><div style="text-align: left;"><b></b><span class="Apple-style-span" style="font-size: x-small;"><span class="Apple-tab-span" style="white-space: pre;"> </span>(les majuscules démarquent les apparitions littérales du monstre concerné)</span></div><br />
<i><span class="Apple-style-span" style="color: #999999;">Excipiunt les monstres féminins</span></i>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-24300182074465835172011-04-14T01:17:00.011+02:002011-04-18T15:00:24.736+02:00Le Gender sur les Dents<div style="text-align: justify;"><span class="Apple-tab-span" style="white-space:pre"> </span>Comme le royaume des hommes, le règne vampirique se divise en deux catégories bien distinctes : les vampires mâles et les vampires femelles. Tous deux ont une existence allégorique assez transparente. Le vampire, c'est le séducteur. La vampire, c'est la séductrice. Mais pour qui a lu quelques romans, ou vécu un peu en pays humain, c'est suffisamment dire la divergence des connotations attachées à chacune des figures et le traitement que leur réservèrent nos auteurs. </div><div style="text-align: justify;"><br /></div><div style="text-align: justify;">Respectons la chronologie, et commençons par son versant mâle. Vous êtes Marguerite, la pureté alliée à la virginité, vous êtes la victime. Vient un monstre qui vous plante ses crocs dans le cou, fait couler votre sang, et, métamorphose irrémédiable, change la jeune fille en cadavre ou la fait accéder définitivement à la communauté inconnue des vampires. Il ne faut pas être grand clerc pour voir dans la terreur suscitée la transposition d'une scène de défloration. Du reste, la morsure du vampire ne cessera jamais vraiment de désigner obliquement un acte charnel. Mais l'imaginaire est, comme toute production humaine, une fonction du temps. </div><div style="text-align: justify;"><br /></div><div style="text-align: justify;"><span class="Apple-tab-span" style="white-space:pre"> </span>Dans <i>True Blood</i> la double trace des crocs dans le cou des personnages féminins vient remplacer – pour signifier, quand le foulard est arraché, leur union avec un vampire – le traditionnel « suçon », si prégnant dans la culture adolescente. Mais l'héroïne, vierge, elle aussi, et bientôt déflorée par son amant vampire (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote1anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote1sym">#1</a>), ressemble d'assez loin à la Marguerite de Goethe, et de très près aux princesses télévisuelles, dont les caprices n'ont de cesse de faire tourner chèvre leur <i>boy-friend</i> officiel : en 1820 comme en 2011, la jeune fille est un concept, et son étude relève de l'histoire des mentalités (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote2anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote2sym">#2</a>). De même, le mariage, l'acte de chair, la peur, les serpents, les vampires. Plus que d'invariants psychanalytique que nous verrions à l'œuvre dans le mythe (et qui le travaillent en effet), il nous faut plutôt, à l'instar des scénaristes de <i>True Blood </i>qui font de leurs vampires une minorité ethnique luttant pour la reconnaissance de ses droits, historiciser l'inconscient, socialiser le phénomène, c'est-à-dire commenter cette prédilection du monstre <i>romantique</i> pour les jeunes filles <i>romantiques</i> et rendre compte du succès furibond (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote3anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote3sym">#3</a>) que le premier <i>Vampire</i> français rencontra sur les planches du théâtre de la Porte Saint Martin, notamment auprès du public féminin. Une corde sensible – une corde d'époque – avait été pincée. </div><div style="text-align: justify;"><br /></div><div style="text-align: justify;"><span class="Apple-tab-span" style="white-space:pre"> </span>Son auteur en est le premier conscient. En faisant la promotion de son monstre auprès des « amateurs de sensations fortes », Charles Nodier ajoutait aussitôt : « les femmes surtout voudront voir ce fantastique personnage », qu'il s'empressait de comparer à Lovelace et à Don Juan. Or, la mention de ces grands séducteurs littéraires indique suffisamment que la clef du mythe ne lui était pas plus inconnue que la clef du succès (qu'il n'avait probablement pas imaginé tel). Bien plus, il avait confié, dans la scène d'exposition de son mélodrame, la description du monstre... au génie du mariage(<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote4anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote4sym">#4</a>), Nodier lui faisant même préciser que le vampire exerce sa fatidique activité « de préférence sur la couche virginale et sur le berceau ». Cette lecture n'est pas le seul fait du dramaturge, il est constitutif de la conscience du mythe en son essor. Lorsque, en 1856, Paul Féval, cherche à décrire sa première rencontre avec un vampire littéraire, il ne peut retrouver les noms du bourreau et de sa victime. Il les baptise donc des noms génériques de Faust et de Marguerite, tout en justifiant son choix de la façon suivante :</div><blockquote style="text-align: justify;">Qu'est le chef d'oeuvre de Goethe, sinon la splendide mise en scène de l'éternel fait de vampirisme qui, depuis le commencement du monde, a desséché et vidé le coeur de tant de familles ?</blockquote><div style="text-align: justify;">Créature de prédation, le vampire avait donc une fonction précise : il représentait – aux yeux des contemporains mâles – le désir sexuel, en tant que celui-ci est une menace pour le mariage et son « génie », pour l'honneur, la famille. Mais on aurait tort de reporter sans la questionner cette séparation tracée par des hommes au-dessus d'une « couche virginale » entre bon génie du mariage et mauvais génie d'une séduction sanguinaire. Dans la plupart des récits de vampire, et contrairement à Lovelace ou à Don Juan, le monstre se marie, et change la nuit de noces en festin (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote5anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote5sym">#5</a>). De même, l'engouement du public féminin pour cette créature de la nuit et du sang trahit probablement la condition réservée à la jeune femme par le mariage lui-même. Pour la jeune fille, l'opposition n'est en effet pas tant entre le mariage et son dehors, qu'entre le mariage et son avant. Bref, il n'y a aucune raison pour ne pas réinjecter la dichotomie susdite à l'intérieur même de l'union conjugale, dont les conditions sociales laissaient encore bien souvent la part charnelle dans la nuit la plus close. L'épouse connaissant le fiancé, non l'époux, le viol de Frollo pouvait l'attendre sur sa couche nuptiale.</div><div style="text-align: justify;"><br /></div><div style="text-align: justify;">Dixit le jeune narrateur de <i><a href="http://fr.wikisource.org/wiki/Novembre_%28Flaubert%29">Novembre</a></i>, en 1842 :</div><div style="text-align: justify;"><blockquote>À ses yeux, celui qui, appuyé sur le Code civil, entre de force dans le lit de la vierge qu’on lui a donnée le matin, exerçant ainsi un viol légal que l’autorité protège, n’avait pas d’analogue chez les singes, les hippopotames et les crapauds, qui, mâle et femelle, s’accouplent lorsque des désirs communs les font se chercher et s’unir, où il n’y a ni épouvante et dégoût d’un côté, ni brutalité et despotisme obscène de l’autre.</blockquote></div><span class="Apple-tab-span" style="white-space:pre"> </span>Ainsi, l'homme vampire ne serait ni plus ni moins qu'une projection du danger et de la fascination que représentent pour la femme de 1820 la sexualité masculine, et ce, quelle que soit la perspective adoptée, point de vue de l'homme ou point de vue de la femme programmé par l'homme (joies et terreur de la prédation, désir hors mariage, séduction, nuit de noces). Inversement, la femme vampire sera bientôt – du point de vue de l'homme d'alors – une projection du danger fascinateur que la sexualité féminine faisait peser sur sa virilité. La misogynie du mythe est ici plus nettement perceptible. Car, je vous le demande <blockquote style="text-align: justify;">quelle est le chef d'œuvre de Dieu, sinon la splendide mise en scène de l'éternel fait de vampirisme qui, depuis le commencement du monde, a desséché et vidé le cœur de tant d'hommes ?</blockquote><div style="text-align: justify;">Moyennant ces ajustements minimes, la phrase de Féval donne en effet la formulation la plus courante des périls liés à la nouvelle figure (à quoi cet écrivain consacre son roman, le premier de la littérature française <a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote6anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote6sym">#6</a>). Il faudrait seulement ajouter ce que le romancier lui-même ajoute dans le corps de son ouvrage, à savoir la propension de la vampire à pomper non seulement le cœur, mais les finances de sa victime, ou, pour le dire cette fois avec Gautier, sa propension à « boi[re] un Européen en trois semaines [en le laissant] sans une goutte d'or ni de sang ».</div><div style="text-align: justify;"><br />Dans ce passage (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote7anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote7sym">#7</a>), Théophile Gautier compare plus précisément les « terribles Javanaises » à « ces gracieux vampires » dont nous venons de rapporter l'effet sur les « Européens ». Ce faisant, Gautier croisait deux tentatives d'incarnation de la femme fatale : par vampirisme et par exotisme. Cette rencontre entre le stéréotype de la femme noire (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote8anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote8sym">#8</a>) et le motif de la vampire ne sera pas la dernière. Dans mon très cher <i>True Blood</i>, le problème des droits des vampires est très explicitement comparé à la ségrégation des noirs (et des homosexuels). Les personnages le manifestent par leurs discours... et leurs amis : Sookie, l'héroïne dont le petit ami est vampire, a pour meilleure amie d'enfance <i>le</i> personnage noir féminin de la série (dont le cousin – black <i>and</i> gay – se prostitue à des vampires homosexuels). Les préjugés raciaux sont dénoncés chez les hommes, blancs ou noirs, comme chez les monstres, hommes ou femmes. Le parallèle culmine peut-être avec ce brave homme accoudé au comptoir d'une pâtisserie, petit vieux bedonnant qu'on nous présente comme le noir sympathique en diable, gourmand de même, grisonnant, et qui finit – à la stupeur effarée de Sookie – par préciser que la serveuse sauvagement assassinée, la gentille Jenny qui était si souriante quand elle lui apportait son gâteau préféré, Jenny avait couché avec un vampire et l'avait donc <i>un peu cherché</i>. Et pourtant... Lorsque notre belle et appétissante vierge est confrontée pour la première fois à un groupe de méchants vampires (il y a les bons, comme Bill, et il y a les méchants, comme eux), tous plus cruels et plus lubriques les uns que les autres, la joyeuse troupe se compose de trois hommes blancs, et d'une femme élancée, sinueuse, insinuante, à demi-nue, et noire : coiffée selon la mode afro des années 70. Et, ô délices de la permanence,</div><div style="text-align: justify;">cette incarnation d'une luxure de série B s'avère alors la face diable de l'ange blanc, l'ex inévitable, la seule mais nécessaire rivale que connaît la pure jeune fille, l'impassible Bill ayant autrefois cédé aux charmes sulfureux de ce démon noir en maillot de bain rouge, il y a de cela quelques siècles, et une fois, oh ! rien qu'une fois (précise-t-il). Mais revenons plutôt à nos bains de sang et d'or.<br /><br /><span class="Apple-tab-span" style="white-space:pre"> </span>Selon qu'il est homme ou femme, et vous l'inverse, le vampire vous fera donc perdre avec votre sang l'honneur ou la fortune (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote9anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote9sym">#9</a>). Et puisque l'argent – sous régime capitaliste tout au moins – est une manifestation privilégiée de la virilité, c'est tout <i>naturellemen</i>t que le mythe, en changeant de sexe, puise dans les acquêts sémantiques du mot et vide, avec le cœur, la bourse de sa victime. Mais si l'on regarde attentivement ces deux exemples, on voit qu'il y a entre « dessécher et vider le cœur d'une famille » et « boire un Européen sans lui laisser ni or ni sang », des filtres qu'on retire : d'une locution l'autre, on se rapproche, en décrivant la perte, du geste de succion (dessécher, vider, pomper), et cette perte elle-même concerne l'homme, la victime, non le cœur de sa famille. En d'autres termes, l'interprétation du vampirisme féminin reste concrète, directe et sanguinaire, quand son pendant masculin avait tendance à se perdre dans l'abstrait. Une conjecture serait de généraliser ces exemples (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote10anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote10sym">#10</a>) : l'idée d'un vampire qui viderait le cœur d'une femme n'a – dans le mythe du vampire byronien – tout simplement aucun sens (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote11anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote11sym">#11</a>). Au contraire, la vampire suce le cœur de l'homme et le vide, car la hantise de l'homme en ces années 1830, ce n'est apparemment pas d'être défloré, mais dévoré (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote12anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote12sym">#12</a>). Et plus encore que dévoré, vidé : supé (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote13anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote13sym">#13</a>). L'invariant psychique semble assez évident (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote14anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote14sym">#14</a>). Mais l'investissement qui en est fait est derechef un trait d'époque, et un trait peu galant. Le danger, la hantise, c'est la vacuité. Et la femme lascive est le risque de cette vacuité, de ce désert intérieur produit par une passion dévastatrice (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote15anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote15sym">#15</a>), qui vous ruine son homme au-dedans comme au-dehors, pille non seulement son or, mais les richesses de son esprit, bref, et pour le dire à nouveau avec Théophile Gautier, décidément le maître ès vampires féminins (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote16anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote16sym">#16</a>), une « passion [qui vous] tarit en quinze jours [non seulement] le sang, [mais] la moelle et l'âme d'un Européen ». L'image peut alors coïncider avec l'idée – tout aussi ancrée dans la rhétorique misogyne – d'une vacuité féminine constitutive. Alors, la menace d'être absorbée par une femme vampire, c'est celle d'être fait femme soi-même, de remplacer sa plénitude virile par un vide féminin. Ainsi, chez Octave Feuillet :</div><div style="text-align: justify;"><br /><blockquote>Je ne vous dis pas qu'elle vous ruinera, quoique ce soit la vérité […] Je vous dis que si vous laissez ce vampire appliquer sa lèvre glacée sur votre sein, il ne s'arrêtera pas qu'il n'en ait retiré et qu'il n'ait flétri tous les dons que Dieu y a versés avec plénitude ; il ne s'arrêtera pas qu'il n'ait fait en vous le vide et le désert qui sont en lui.</blockquote></div><div style="text-align: justify;"><br /></div><div style="text-align: justify;"><span class="Apple-tab-span" style="white-space:pre"> </span>Non seulement le contexte, mais le tropisme misogyne empêchent toute lecture fautive de ces pronoms masculins : ce vampire est évidemment une femme (<a class="sdfootnoteanc" name="sdfootnote17anc" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote17sym">#17</a>). On remarquera seulement que le genre du pronom a déteint sur le sexe... de la victime : si l'effet est bien, et par excellence, celui d'une vampire femelle, l'endroit de la morsure en revanche correspond davantage au vampire mâle, qui, suivant la pente masculine, glisse plus volontiers du cou au sein qu'ailleurs. Au contraire, la femme vampire s'en prend généralement plus bas, au doigt. Mais ceci, c'est un autre post.<p></p> <div><br /></div><i><span class="Apple-style-span" style="color:#C0C0C0;">Excipiunt les succions sexistes</span></i><br /><br /><span class="Apple-style-span" style="font-size:x-small;"><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote1sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote1anc">1</a> Le choix d'une héroïne vierge et d'un beau vampire ténébreux s'accompagne d'une prégnance des rapports sexuels entre vampires mâles et humains femelles, ou entre vampires et humains mâles (l'un des personnages est spécialisé dans la prostitution masculine avec des vampires), mais alors la caméra s'arrête au premier baiser. Les femmes vampires qui passent dans la série semblent partager le goûts de leurs congénères mâles pour la belle et vierge Sookie. Du reste, je me suis arrêté à la première saison, je ne puis donc affirmer que la série continue sur cette lancée byronienne. Je fonde d'ailleurs tous mes espoirs sur cette jeune fille que le gentil vampire est contraint de changer en vampire par la méchante assemblée des vampires. Cette jeune fille vierge qui le suppliait à grands cris de n'en rien faire est finalement ravie de sa métamorphose, s'avère incontrôlable et s'apprête à commettre les frasques les plus sanglantes, au grand dam de notre héros. Suite, donc, aux prochains épisodes.<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote2sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote2anc">2</a> Sur le sujet, voir <i>Premiers Matériaux pour une Théorie de la jeune fille</i>, du collectif Tiqqun (1999). Quant aux premiers matériaux pour une théorie de la princesse<sup>®</sup>, voir le blog <i>Nord Express,</i> d'Otto Karl,<a href="http://nordexpress.blogspot.com/2009/06/deux-classes-de-filles.html"> billet du 23 juin 2009</a>.<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote3sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote3anc">3</a> L'expression est de Paul Féval.<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote4sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote4anc">4</a> Ce prologue est plusieurs fois reproduit au cours du siècle. Dumas le cite dans ses <a href="http://books.google.fr/books?id=nygJAAAAQAAJ&pg=PA217"><i>Mémoires</i></a> (1852) et Champfleury dans ses <a href="http://www.archive.org/stream/lesvignettesroma00chamuoft#page/38/mode/2up"><i>Vignettes romantiques</i></a> (1883)<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote5sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote5anc">5</a> Dès la nouvelle originelle du docteur Polidori (<i>The Vampire</i>, d'où le mélodrame de Nodier était extrait et qui dut son extrême popularité au fait qu'on le crut d'abord de Byron), Lord Ruthwen épouse bel et bien les jeunes vierges qu'il décime. Pour un exemple tardif et des noces interrompues devant l'autel, voir Léon Gozlan, <i>Le Vampire du Val de Grâce</i>, Paris, 1862, <a href="http://books.google.fr/books?id=yZIGAAAAQAAJ&pg=PA63">p. 63</a>.<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote6sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote6anc">6</a> <i>La Vampire </i>est publié en 1856, dans une nouvelle série du célèbre polygraphe, intitulée <i>Les Drames de la mort</i>. On trouve bien des femmes vampires auparavant, mais je ne sache pas qu'il y ait de roman antérieur consacré à cette figure. <i>La Vampire</i> de Hoffman (1825) est une nouvelle, et elle ne relève pas encore du mythe.<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote7sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote7anc">7</a> De « Fortunio », qu'on trouvera dans ses <i>Nouvelles</i>, Paris, 1845, <a href="http://books.google.fr/books?id=keI5AAAAcAAJ&pg=PA150">p. 150</a>.<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote8sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote8anc">8</a> Voir l'article « négresse » du <a href="http://books.google.fr/books?id=4GlK-72jabIC&pg=PA114#v=onepage&q&f=false"><i>Dictionnaire des idées reçues</i></a>.< <a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote9sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote9anc">9</a> Dans le roman de Paul Féval, le premier consacré explicitement au nouveau type féminin, la définition du vampirisme se fonde sur le pôle mâle du mythe. Mais son titre est <i>La Vampire</i> et la trame illustre l'oscillation du pôle féminin entre l'or et le sang, qu'on trouve aussi chez Gautier, Musset, etc.<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote10sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote10anc">10</a> La même abstraction présidait à l'écriture du prologue théâtrale et à son allégorique « génie du mariage », et les textes que j'ai consultés semblent toutefois confirmer cette hypothèse d'une retenue plus grande quand la victime est une femme (ou d'une complaisance plus grande quand elle est la vampire). Il faudrait toutefois mener une étude sur un corpus plus détaillé. Par ailleurs, si le vampire mâle représente le danger de la sexualité féminine pour l'homme, il faut bien comprendre qu'il parle donc plutôt de la sexualité masculine (de ses fantasmes, de ses peurs), tandis qu'il laisse dans l'ombre du danger la sexualité de la femme. Inversement, le vampire masculin en dit plus long sur le point de vue de la femme que son homologue féminin. Il faut donc, dans cette plus ou moins grande retenue, prendre en considération le processus euphémistique qui semble partout régner en matière de sexualité féminine. Sur nos paquets de cigarettes, fumer « peut nuire aux spermatozoïdes », mais « réduit la fertilité ».<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote11sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote11anc">11</a> Le lecteur pourra trouver un démenti au mythe byronien dans le beau roman de Henry James, <i>Portrait de femme</i>, où une belle et jeune anglaise est littéralement desséchée par un homme d'une intelligence supérieure, mais supérieurement égoïste et mesquin. Je n'ai pas souvenir que l'image du vampire transite par cet ouvrage, mais il me semble qu'il est question d'insecte pris dans la toile d'une araignée (à moins que je ne projette là une image hugolienne). En somme, et comme l'air du temps le colporte de blog en blog : « Le pervers narcissique est [aussi] un vampire ».<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote12sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote12anc">12</a> Si l'on précise la généalogie de la vampire, le motif dérive en réalité de l'union du vampire byronien avec la goule orientale, reprises des <a href="http://books.google.fr/books?id=n3E7AAAAcAAJ&pg=PA379"><i>Mille une Nuits</i></a> par <a href="http://gutenberg.spiegel.de/buch/3106/93">Hoffmann</a>, <a href="http://books.google.fr/books?id=J_w_AAAAcAAJ&pg=PA156#v=onepage&q&f=false">Beckford</a>, Dumas, etc. Et la goule est une dévoratrice de cadavres.<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote13sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote13anc">13</a> Normandisme (flaubertien) pour « aspirer », « gober », notamment un œuf.<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote14sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote14anc">14</a> <i>Post coïtum</i>, animal vide. Cette crainte masculine de perdre à chaque étreinte un peu de ses forces (et bientôt sa virilité), cette hantise de l'énervation, a trouvé de multiples et savoureux relais, de Pétrone à Stanley Kubrick.<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote15sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote15anc">15</a> Dans le roman de Féval, comme dans « Oscar » de Musset, la vampire n'est pas loin d'être une nouvelle allégorie du mal d'amour, qui fait maigrir les jeunes gens et <i>les fait tomber en phtisie</i>. Du reste, on trouve sous plusieurs plumes l'Ennui dépeint comme un vampire, mais un vampire masculin, vague parent du monstre baudelairien, fumant son houka d'un pleur involontaire (voir par exemple <a href="http://books.google.fr/books?id=b-IaAAAAYAAJ&pg=PA432">ici</a>). Barbey d'Aurevilly parle même de « l'ennui, le vrai vampire des femmes du monde ». Mais la femme du monde en question n'a, « pour toute ressource contre [ce monstre] que ses réflexions qui ne savaient pas l'en défendre » (<i>impossible</i>, Paris, 1859, <a href="http://books.google.fr/books?id=YcstAAAAMAAJ&pg=RA1-PA122">p. 122</a>). On voit donc que la vacuité précédait en quelque sorte le vampire...<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote16sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote16anc">16</a> Discourant sur la postérité de La Morte amoureuse sur "le vampire littéraire moderne", Brian Stableford écrit même : "while Dracula provided the literary archetype of the male vampire, Clarimonde provided the literary archetype of the female vampire" ("La Morte amoureuse" in <i>Encyclopedia of the Vampire: The Living Dead in Myth, Legend, and Popular</i>, dir. S. T. Joshi, <a href="http://books.google.fr/books?id=CaqE82YIh4QC&lpg=PP1&pg=PA214#v=onepage&q&f=false">p. 214</a>.)<br /><br /><a class="sdfootnotesym" name="sdfootnote17sym" href="http://hircocerf.blogspot.com/2011/04/gender-vampire.html#sdfootnote17anc">17</a> Du reste, cette résistance du genre masculin perdure jusqu'à aujourd'hui. On peut dire d'une femme que c'est un vrai vampire, comme dit que c'est un serpent. (Nous revenons à eux).</span></div>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0tag:blogger.com,1999:blog-3097179927666277348.post-38764027289888963712011-04-12T22:49:00.009+02:002011-04-14T11:31:49.374+02:00Baudelaire, vampireChose oubliée, le vampire a été une figure de ralliement du romantisme.<div><br /></div><div>Un exemple d'usage postérieur et péjoratif de ce signe de reconnaissance oublié est pourtant connu des baudelairistisants. Un article d'Edmond Duranty paru dans <i><a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k269521x/f5.image.">Le Figaro</a></i><a href="http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k269521x/f5.image."> du 13 novembre 1856</a> :</div><div><br /></div><div><a href="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEihFVklGfx_WSZCBbuaW9LwGoNz6yOBzzzkBgLqh6iAPCs1yzx6JZXdaqnqTAX-4HafWXY7dKz77hqiLkVPMV3lWe0NKwLMoWWnbKy3S_TlM34c4Q16biH42zR73b2O74lOlhp2bCeaGMF0/s1600/vdf.png" onblur="try {parent.deselectBloggerImageGracefully();} catch(e) {}"><img src="https://blogger.googleusercontent.com/img/b/R29vZ2xl/AVvXsEihFVklGfx_WSZCBbuaW9LwGoNz6yOBzzzkBgLqh6iAPCs1yzx6JZXdaqnqTAX-4HafWXY7dKz77hqiLkVPMV3lWe0NKwLMoWWnbKy3S_TlM34c4Q16biH42zR73b2O74lOlhp2bCeaGMF0/s400/vdf.png" border="0" alt="" id="BLOGGER_PHOTO_ID_5594802961706091570" style="display: block; margin-top: 0px; margin-right: auto; margin-bottom: 10px; margin-left: auto; text-align: center; cursor: pointer; width: 325px; height: 280px; " /></a></div><div>Tête de mort, Guignon, Satan, Doute, fatalité, pourriture et vampire : voilà la signature des traînards romantiques.</div><div><br /></div><div>L'habileté de Duranty est de faire précéder l'acception imagée que l'époque attendait par son détournement, en filant la comparaison avec la relation à Poe, la traduction et l'image inversée d'un saint Vampire partageant, pour s'en revêtir, le manteau d'autrui.</div><div><br /></div><div>Deux trois remarques en passant :</div><div><br /></div><div>- C'est dans cette “préface tourmentée”, ou dans la suivante (il faut vérifier les dates) que Baudelaire qualifie l'un des amis de Poe chargé de son œuvre de “pédagogue vampire”.</div><div><br /></div><div>- Chose amusante, Gautier - autre vampirisé par le fervent disciple - comparerait bientôt la muse de Baudelaire à une héroïne de Hawthorne, comparée elle-même à une de ces “<a href="http://books.google.fr/books?id=i4MTAAAAQAAJ&pg=PA597&dq=%22vampires+d%27amour%22&hl=fr&ei=OAeUTbLJD5C94AawluW4DA&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=1&ved=0CDQQ6AEwAA#v=onepage&q=vampires%20muse&f=false">vampires d'amour</a>” redoutables aux Européens. Ce faisant, il taillait sa métaphore dans un de ses propres textes, déchirant son manteau pour en couvrir son benjamin, qui se dirait avoir été là pour la première fois loué comme il désirait l'être.</div><div><br /></div><div>- Dans <i>Les Fleurs du mal</i>, c'est de son propre cœur que le poète est le vampire.</div><div><br /></div><div><i><span class="Apple-style-span" style="color:#C0C0C0;">Excipit Baudelaire d'outre-tombe</span></i></div>l'hircocerfhttp://www.blogger.com/profile/10996770971607651673noreply@blogger.com0