vendredi 2 avril 2010

Taissons de Dahu dans l'Enfer de Dante ?

En feuilletant la Pseudodoxia Epidemica, j'ai été surpris d'apprendre que le blaireau (ou taisson) avait été taxé de pattes plus courtes d'un côté que de l'autre. Brown rejette cette hypothèse mais indique qu'elle est généralement partagée, et ancienne.

Aussitôt, j'ai pensé au Dahu, et presqu'aussitôt après à ce passage obscur de L'Enfer de Dante :
Si che'l pie più fermo era sempre l'più basso
Je cite de tête, alors pincettes.

Et je furète, un peu, sur internet.

Dès la parution française en 2005, un lecteur de Brown avait fait le rapprochement sur son blog.

D'ailleurs l'édition en ligne de la sixième édition de l'original anglais (1672, et 46 pour la première) indique (ici) :
Topsell (Historie of Foure-footes Beasts, 1607, p. 34) reports that "some say" the legs are longer on the right than on the left and that therefore the badger "runneth best when he getteth to the side of a hill, or a cart-road-away."
Ce qui fait songer à la raison avancée pour notre Dahu national qui n'est courtaud que d'un côté, à savoir qu'il vit perpétuellement sur les pentes.

Et qui fait songer les songe-creux aux vers de Dante gravissant son colle giunto.

Wikipédia parlait aussi du Bitard en Poitou. Mais le rapprochement semblait là aussi formel: une chasse à la chimère dans les deux cas, à la chignole dans le second. Et pas de signalement de Bitard aux pieds torts.

Quand soudain j'appris au hasard d'un forum que le Bitardus Paradoxus conservé religieusement dans les murs de l'université de Poitiers était un être composite et composé d'une tête de fouine, d'un corps de carpe, d'une queue de paon, et... de pattes de blaireau !

Tout cela mêlant folklore charivarique et traditions orales se ressourçant à Rabelais, je n'ose exclure qu'un hasard, comme les trains, ne cache un hôte, et n'ose non plus le supposer tout à fait.

Fallait-il pousser plus loin les chiens ?

Du moins aurai-je trouvé ce réjouissant article qui m'apprend que le bitard est un butor, cause que je me réjouis, mais qui m'apprend - et je suis fort marri pour ne pas dire vexé de ne l'avoir point su - que la perdrix est "étymologiquement péteuse". Voici l'article (la perdrix pète à la note 45 de la page 79):



Et voici, pour être tout à fait composite, nous aussi, un tableau qui explique pourquoi me touche tout ce qui touche au boeuf-taureau des marais:


Elle est du grand Jean-Baptiste Oudry (grand ne signifiant rien d'autre que mon goût pour ce peintre) et vous pourrez la saluer pour moi au musée du Louvres, ou la consulter sur le site image de la RMN, ainsi qu'un plus célèbre autoportrait de Rembrandt, que je pourrai saluer pour vous.

Quant à Dante, on se demande un peu ce qu'il est venu faire dans ces chimères.

Excipiunt Les Taissons du Dahu

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